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La souveraineté dans un monde globalisé

Intervention de M. Mario Draghi, président de la Banque centrale européenne, à l’occasion de la réception du titre de docteur honoris causa en droit décerné par l’Università degli Studi di Bologna, le 22 février 2019

Mesdames et Messieurs, c’est pour moi un grand honneur de m’exprimer aujourd’hui devant vous ici, à l’Université de Bologne.

Plus ancienne université européenne, elle est au cœur de l’enseignement et de l’éducation en Europe depuis plus de 900 ans. L’université de Bologne a développé une longue tradition d’accueil d’étudiants venant des quatre coins du Continent européen, notamment Thomas Becket et Copernic. Érasme étudiait ici en 1506 et l’université de Bologne est aujourd’hui un des principaux acteurs du programme d’échange d’étudiants qui porte son nom.

Le programme Erasmus, extrêmement apprécié, est l’un des nombreux exemples des avantages d’une étroite coopération au sein de l’Union européenne (UE). Mais, comme nous le savons, d’autres éléments de l’intégration européenne sont davantage contestés de nos jours.

Il existe, au cœur du débat sur les mérites de la coopération européenne, une tension inhérente entre, d’une part, les bénéfices évidents de l’intégration économique et, d’autre part, la coopération indispensable pour que ces bénéfices deviennent réalité, qu’il est parfois difficile, politiquement, de mettre en œuvre ou d’expliquer. Je pense que cette tension est, à bien des égards, illusoire. Plutôt que de leur ôter leur souveraineté, l’UE offre aux pays qui la composent une voie pour la regagner.

Cela ne veut pas dire, cependant, que nous avons besoin de l’UE dans tous les domaines. Face à la mondialisation, elle est toutefois plus pertinente aujourd’hui que jamais. Comme l’a dit Jean Monnet, « nous avons besoin d’une Europe pour ce qui est essentiel (…), une Europe pour ce que les nations ne peuvent faire seules »[1].

La souveraineté dans un monde interconnecté

Globalement, il semble que les citoyens européens apprécient les bienfaits de l’intégration économique apportés par l’UE[2]. La libre circulation des personnes, des biens et des services, grâce au Marché unique, est généralement perçue comme le résultat le plus positif de l’UE. De même, 75 % des habitants de la zone euro sont favorables à l’euro et à l’union monétaire, alors que 71 % des Européens soutiennent la politique commerciale commune de l’UE.

L’opinion publique européenne se montre toutefois plus sceptique à l’égard des structures politiques de l’UE. La confiance dans l’UE est en moyenne de 42 %, contre 57 % en 2007. Ce recul s’inscrit dans le contexte d’une perte de confiance généralisée dans les institutions publiques. La confiance dans les gouvernements et les parlements nationaux est ainsi tombée à 35 %.

Cette tension entre intégration économique et coopération politique est alimentée par une conviction tenace : il faudrait absolument choisir entre l’appartenance à l’UE et la capacité à exercer la souveraineté. Autrement dit, si les citoyens veulent exercer un plus grand contrôle sur leur destin, ils devraient desserrer l’étreinte des structures politiques européennes.

Cette croyance est erronée, car elle confond indépendance et souveraineté.

La véritable souveraineté ne réside pas dans le pouvoir de faire la loi, selon une définition juridique, mais dans un plus grand contrôle des événements afin de répondre aux besoins fondamentaux des citoyens, que John Locke définit comme « la paix, la sécurité et le bien public »[3]. La capacité de prendre des décisions de façon indépendante n’assure pas un tel contrôle. En d’autres termes, l’indépendance ne garantit pas la souveraineté.

Les pays totalement en marge de l’économie mondiale, pour prendre un exemple extrême mais parlant, sont indépendants mais pas souverains, au sens propre, dans la mesure où ils sont parfois contraints de recourir à une aide alimentaire extérieure pour nourrir leur population. Les pays connectés par la mondialisation n’en sont pas moins vulnérables.

En effet, ils sont plus exposés aux risques de contagion financière et aux politiques commerciales agressives des pays étrangers. La concurrence accrue rend plus difficile la coordination entre États, nécessaire pour réglementer et fixer les normes sociales. Cela restreint le contrôle qu’ils peuvent avoir sur leur situation économique intérieure.

Dans un tel environnement, les pays doivent travailler ensemble pour exercer la souveraineté. Et cela vaut davantage encore au sein de l’UE. La coopération, en Europe, contribue à protéger les pays des pressions extérieures et à rendre leurs politiques nationales plus efficaces.

Travailler ensemble pour se protéger

La mondialisation a profondément modifié la nature des processus de production et rendu les liens entre pays plus étroits. Les avoirs financiers transfrontaliers représentent, de nos jours, environ 200 % du PIB mondial, contre environ 70 % en 1995. Les échanges commerciaux sont passés d’environ 43 % du PIB mondial en 1995 à quelque 70 % aujourd’hui. En outre, environ 30 % de la valeur ajoutée étrangère provient des chaînes de valeur mondiales[4].

Au niveau mondial, ce processus n’a pas tant été le fruit de décisions politiques, mais bien plus du progrès technologique dans les domaines des transports, des télécommunications et de l’informatique, qui a favorisé le commerce international et la fragmentation de la production[5].

L’UE, par les choix politiques opérés par le passé et la proximité géographique de ses membres, est de loin la zone commerciale la plus importante pour les pays qui la composent. L’essentiel du commerce mondial se concentre au sein de trois grands espaces commerciaux, à savoir l’UE, l’ALENA (Accord de libre-échange nord-américain) et l’Asie et, si des liens se sont développés entre ces zones, chacune demeure relativement fermée aux deux autres. Dans ces régions, le taux d’échanges extrarégionaux par rapport au PIB est inférieur à 15 %[6].

L’UE est la plus intégrée de ces trois zones. Deux tiers du commerce des pays de l’UE s’effectuent avec d’autres États membres, contre environ la moitié pour l’ALENA. Environ 50 % des avoirs financiers transfrontière dans la zone euro proviennent d’autres pays de la zone euro. Concrètement, l’Italie exporte donc davantage vers l’Espagne que vers la Chine et plus vers l’Autriche que vers la Russie ou le Japon. En 2017, les investissements directs allemands en Italie ont été cinq fois supérieurs à ceux des États-Unis.

L’Europe a largement bénéficié de cette intégration. Le Marché unique aurait accru le PIB de l’UE d’environ 9 % si l’on tient compte des échanges commerciaux directs et des effets de concurrence[7]. Mais, plus proches, les pays européens s’exposent aussi davantage à la volatilité des flux de capitaux, à la concurrence déloyale ou aux mesures discriminatoires, ce qui rend indispensable une plus grande protection des citoyens.

Cette protection, construite ensemble, leur a permis de récolter les fruits de l’intégration tout en en limitant les coûts. Les structures et institutions européennes communes limitent les effets de contagion, assurent une égalité de traitement et protègent contre les comportements injustes. Elles permettent ainsi de répondre aux besoins des citoyens et aux pays d’exercer leur souveraineté.

Les structures européennes prévoient que Conseil de l’UE et le Parlement européen fixent les règles communes, que la Commission veille à leur respect et que la Cour de justice européenne assure la protection judiciaire en cas de violation. Au niveau de la zone euro, la supervision bancaire européenne et le mécanisme de résolution unique contribuent à contenir les effets de l’instabilité financière.

Dans cet environnement interconnecté, vouloir s’affranchir des institutions européennes ne va pas sans poser de sérieux dilemmes. Soit les pays acceptent les règles adoptées par d’autres pour continuer de pouvoir accéder au marché européen, ce qui limite leur contrôle sur des décisions nationales, soit ils se distancient de leurs partenaires commerciaux les plus proches et perdent en partie le contrôle sur le bien-être de leur citoyens.

Si les barrières commerciales étaient réintroduites en Europe, le PIB reculerait d’environ 8 % en Allemagne et de quelque 7 % en Italie, selon les estimations[8].

L’argument selon lequel la coopération renforce la souveraineté vaut également pour la relation entre l’UE et le reste du monde. Peu de pays européens ont une taille leur permettant de résister aux retombées générées par les grandes économies ou de peser sur des négociations commerciales internationales. Au sein de l’UE, en revanche, leur force est démultipliée.

L’UE représente 16,5 % de la production économique mondiale[9], seule la Chine la devançant, ce qui procure aux pays européens un vaste marché domestique de repli en cas de perturbations commerciales. Les échanges commerciaux au sein de l’UE constituant 15 % du commerce mondial[10], contre environ 11 % pour les États-Unis, l’UE bénéficie d’un poids significatif dans les négociations commerciales. Par ailleurs, l’euro est la deuxième monnaie internationale la plus échangée, ce qui protège l’économie de la zone euro de la volatilité des cours de change.

En fait, environ 50 % des importations en provenance des pays hors zone euro sont aujourd’hui facturées en euros[11], ce qui réduit les effets de transmission de la volatilité des cours de change sur les prix à l’importation. La politique monétaire peut ainsi se concentrer sur les évolutions économiques au sein de la zone euro sans avoir à réagir immédiatement à des chocs externes[12].

Pour toutes ces raisons, se trouver en dehors de l’UE peut aller de pair avec une plus grande indépendance en matière de politique économique, mais pas nécessairement s’accompagner d’une plus grande souveraineté. Il en va de même pour la monnaie unique.

Seuls, la plupart des pays ne bénéficieraient plus de la facturation en monnaie locale, ce qui exacerberait les effets inflationnistes en cas de forte dévaluation. En outre, ils seraient davantage exposés aux répercussions des politiques monétaires extérieures, en particulier celle de la BCE, ce qui pèserait sur l’autonomie de leur politique économique. Ces dernières années, le Danemark, la Suède, la Suisse et les économies d’Europe centrale et orientale ont subi les effets de nos mesures[13].

En fait, ces effets de contagion provenant des plus grandes économies ont, dès le départ, été l’une des raisons de la création de la zone euro. Au sein du Système monétaire européen, qui a précédé l’euro, la plupart des banques centrales devaient s’aligner sur la Bundesbank (Banque fédérale d’Allemagne). Après plus d’une décennie d’expériences décevantes, voire dévastatrices, il a été jugé préférable de regagner la souveraineté monétaire à travers la mise en place d’une monnaie unique[14].

Coopération et politique économique

La mondialisation contraint la souveraineté d’une deuxième manière, en limitant la capacité des pays à adopter des lois ou à fixer des normes qui correspondent à leurs objectifs sociaux.

L’intégration du commerce mondial tend à réduire l’autonomie des différents pays car, avec la fragmentation de la production à travers les chaînes de valeur, le besoin de normes communes se renforce. Ces normes ne sont généralement pas produites au sein de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), par exemple, mais sont définies par les grandes économies bénéficiant d’une position dominante dans la chaîne de valeur. Les économies plus petites sont souvent amenées à accepter les règles définies par d’autres dans le système international[15].

De même, l’intégration financière internationale peut également réduire le pouvoir des différents pays de réglementer, taxer et faire respecter des normes de protection sociale. Les sociétés multinationales influencent les réglementations nationales à travers la menace des délocalisations et arbitrent entre les systèmes fiscaux en déplaçant les flux de revenus et les actifs incorporels vers les juridictions les plus favorables. Les pays peuvent aussi être incités à utiliser les normes sociales comme instrument de compétitivité internationale, c’est-à-dire pratiquer le « nivellement par le bas ».

Il devient ainsi plus difficile pour les pays de défendre leurs valeurs fondamentales et, partant, de protéger leurs citoyens. Cela conduit également à une érosion des assiettes fiscales des entreprises et donc à une plus grande difficulté à financer l’État-providence[16]. L’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) estime, par exemple, que les pertes de recettes mondiales dues à l’évasion fiscale représentent entre 4 % et 10 % de l’impôt sur les sociétés[17].

Ces effets se manifestent lorsque les pays ne sont pas assez grands pour exercer un pouvoir réglementaire sur les entreprises multinationales ou sur la mobilité des capitaux. L’UE est moins propice à ce type de situations, car c’est un marché dont les entreprises auraient du mal à se passer. Le fait de disposer du pouvoir réglementaire au niveau de l’UE permet aux États membres d’exercer une véritable souveraineté dans les domaines de la fiscalité, de la protection des consommateurs et des normes sociales.

L’UE permet à ses membres d’empêcher les multinationales de se soustraire à l’impôt sur les sociétés, en jouant sur les lacunes fiscales ou sur les aides indues. Il s’agit là d’une question complexe, mais des progrès ont récemment été réalisés sur ce front. De nouvelles règles européennes sont entrées en vigueur cette année afin d’éradiquer les pratiques d’évasion fiscale les plus couramment utilisées par les entreprises[18]. Et s’il est vrai que la Cour de justice européenne a récemment tranché en défaveur de la Commission européenne dans une affaire d’exonération fiscale, elle a aussi rappelé que les accords fiscaux particuliers entre des multinationales et certains pays peuvent constituer une aide d’État illégale, que la Commission est en droit d’examiner[19].

De plus, l’UE peut bien mieux défendre les consommateurs et leur assurer une égalité de traitement au sein du marché européen.

Cela s’est vérifié quand elle a été en mesure de faire valoir ses principes sur la protection de la vie privée à travers le règlement européen général sur la protection des données (RGPD)[20]. De la même manière, elle en a fait la démonstration avec ses réglementations visant à diminuer les frais d’itinérance (le roaming) facturés aux consommateurs en Europe[21] ou à garantir que les paiements transfrontière en euros au sein de l’UE ne puissent pas être surfacturés par rapport aux virements domestiques[22].

L’UE permet aussi aux pays de se coordonner pour défendre leurs systèmes de protection sociale sans avoir à imposer des restrictions commerciales.

Avec la Charte des droits fondamentaux, le droit européen a réduit les possibilités de concurrence déloyale en provenance de pays disposant de législations du marché du travail moins protectrices. Et il a aussi contribué à relever les normes sociales dans l’UE. Exemple : la directive européenne de 1997 sur le travail à temps partiel, qui avait réduit certaines formes de discrimination toujours en vigueur à l’époque dans dix des quinze États membres de l’UE[23], dont l’Italie. L’OCDE a établi une corrélation, dans le temps, entre l’introduction de lois relatives à l’égalité de traitement et la probabilité accrue d’obtenir un contrat à durée indéterminée[24].

De telles protections n’existent pas à l’échelle mondiale ou sont beaucoup plus faibles dans les autres zones commerciales régionales comme l’ALENA. L’histoire même des États-Unis montre à quel point il est difficile d’aligner les approches de différents États en vue d’améliorer les conditions de travail.

Au début du 20e siècle, l’absence d’un filet de sécurité sociale, particulièrement pour les travailleurs plus âgés, préoccupait plusieurs États américains. Mais certains États ont craint que l’octroi d’une sécurité sociale n’impose, selon les mots de l’époque, une charge fiscale sur les industries locales qui les désavantagerait dans leur concurrence avec les États voisins ne subissant pas la charge d’un système de retraite[25].

Le défaut de coordination a entraîné un grave sous-financement de la sécurité sociale, qui a été renforcé par la Grande dépression. En 1934, la moitié des plus de 65 ans étaient pauvres[26]. Cette situation n’a été résolue qu’en 1935 avec la loi fédérale sur la sécurité sociale (Social Security Act), qui a permis aux États de coordonner leurs efforts en vue d’une sécurité sociale.

De même, l’UE a constitué un facteur puissant de coordination permettant à ses membres d’atteindre des objectifs qu’ils n’auraient pu réaliser isolément. Et elle a même réussi à exporter certaines de ses normes dans le monde.

L’UE est le principal partenaire commercial de quatre-vingt pays, contre un peu plus de vingt pour les États-Unis[27]. Elle peut par conséquent plaider en faveur de l’application, à l’étranger, de normes élevées sur les conditions de travail et la qualité des produits par à travers ses ’accords commerciaux[28] tout en protégeant ses producteurs locaux. Ainsi, l’accord commercial conclu récemment avec le Canada protège 143 indications géographiques européennes.

Mais le pouvoir réglementaire de l’UE dépasse les accords commerciaux. Les exportateurs à destination de l’UE devant satisfaire à ses normes, des économies d’échelle résultent de leur application à la production dans tous les pays. On parle de l’« effet de Bruxelles »[29]. L’UE détermine ainsi, de facto, les règles mondiales dans de nombreux domaines.

Les pays de l’UE se trouvent ainsi dans une position unique, leur permettant de veiller à ce que la mondialisation ne se traduise pas par un nivellement par le bas en matière de normes. Au contraire, l’UE est en mesure de tirer les normes mondiales vers le niveau qu’elle a elle-même défini.

Institutions et règles

Il paraît donc évident que, dans une économie régionale et mondiale intégrée, les pays européens ont tout intérêt à coopérer pour pouvoir exercer une véritable souveraineté. C’est sur la question de l’organisation de cette coopération que les avis divergent.

Certains défendent une simple coopération au cas par cas entre les gouvernements nationaux. À plusieurs reprises dans l’Histoire, la bonne volonté de certains États a en effet permis des accords fructueux. Lorsque toutes les parties tirent des bénéfices équitables, une coopération souple de cette nature peut être soutenable à long terme. Il en est ainsi du processus de Bologne, qui a contribué à un alignement de normes pédagogiques plus élevées et à la reconnaissance mutuelle des diplômes universitaires entre les pays membres du Conseil de l’Europe[30].

Mais il est tout aussi évident que quand une coopération est vraiment indispensable, une coopération souple ne suffit plus. Les problèmes liés à la coordination surviennent quand les pays sont incités à faire cavalier seul ou quand les effets de contagion frappent les grandes et les petites économies de façon asymétrique[31]. Dans de telles situations, des formes approfondies de coopération s’imposent.

L’UE, dans son histoire, a eu recours à deux méthodes de coopération. Nous avons dans certains cas confié un pouvoir exécutif à des institutions européennes, la politique commerciale à la Commission européenne ou la politique monétaire à la BCE, par exemple. Dans d’autres domaines, le pouvoir exécutif est resté aux mains des gouvernements nationaux, une coopération étant établie sur la base de règles communes. C’est le cas notamment du cadre pour les politiques budgétaires et structurelles.

Ces pans de la politique économique ont été jugés trop étroitement liés à la situation spécifique de chaque pays pour être confiés à un organe commun. Il a été estimé que la seule forme de gouvernance possible était de laisser leur souveraineté nationale aux pays, tenant compte ainsi de leurs circonstances particulières. Une approche fondée sur des règles a semblé être la seule solution conforme à cette vision. Mais il convient de se demander à quel point ce choix s’est montré judicieux.

Lorsque le pouvoir exécutif a été confié à des institutions, la plupart des observateurs s’accorderaient à reconnaître que ces dernières ont rempli leur rôle assez efficacement. La politique commerciale s’est traduite par une ouverture sur de nouveaux marchés : l’UE est partie prenante de trente-six accords de libre-échange, contre vingt pour les États-Unis[32]. La politique monétaire a rempli son mandat avec succès.

Mais dans les domaines s’appuyant sur une approche fondée sur des règles, certaines carences ont été relevées. Les règles budgétaires ont fourni un cadre d’évaluation des politiques de finances publiques, mais ont parfois été difficiles à faire appliquer et à expliquer à nos concitoyens. S’agissant des politiques structurelles, les recommandations spécifiques par pays n’ont eu que des effets limités, moins de 10 % étant « substantiellement » mises en œuvre chaque année[33].

Les différences entre les résultats obtenus avec chaque méthode n’ont pas de liens avec le professionnalisme des autorités européennes et nationales, mais découlent, en fait, de la différence intrinsèque entre règles et institutions. Deux raisons permettent d’expliquer pourquoi la coopération à travers des institutions l’a emporté sur les règles.

Premièrement, la nature des règles est généralement statique. Elles requièrent des pays qu’ils adoptent des mesures spécifiques. Les institutions, quant à elles, doivent atteindre des objectifs. Il est impossible de modifier rapidement les règles en cas de circonstances imprévues, tandis que les institutions peuvent faire preuve de dynamisme et de souplesse dans la réalisation de leurs objectifs. Cette distinction revêt une importance cruciale quand, comme c’est souvent le cas, la réalité évolue. Elle est fondamentale pour les citoyens, qui, en définitive, s’intéressent davantage aux résultats de la politique économique qu’aux actions engagées par les gouvernements.

La politique monétaire conduite par la BCE pendant la crise illustre bien cette plus grande adaptabilité des institutions par rapport aux règles.

La BCE, institution somme toute récente, a dû faire face à des défis qui étaient difficilement prévisibles lorsque son mandat a été défini. Mais le traité associe notre mission de maintien de la stabilité des prix à moyen terme à un pouvoir discrétionnaire quant aux instruments susceptibles d’être employés à cet effet. C’est ce qui nous a permis de déployer toute une gamme d’outils non conventionnels de politique monétaire afin d’assurer que l’inflation demeure conforme à notre objectif. Ni une politique monétaire basée sur des règles figées, ni le recours aux seuls instruments utilisés par le passé n’aurait suffi.

La latitude et la souplesse avec lesquelles nous avons recouru à nos instruments ont contribué à renforcer la crédibilité de la BCE. Souplesse et crédibilité se sont avérées complémentaires.

En revanche, les règles perdent de leur crédibilité dès lors qu’elles sont appliquées librement. Elles sont affaiblies si les pays jugent bon de les contourner ou les remanient quand elles deviennent contraignantes. Or, des événements qui ne pouvaient pas être prévus lorsque les règles ont été élaborées se produiront toujours, exigeant de la souplesse. S’agissant des règles, un compromis est inévitable entre crédibilité et souplesse.

C’est pourquoi les politiques économiques qui suivent une approche fondée sur des règles génèrent invariablement des tensions. Mais la transition vers la mise en place d’institutions requiert un climat de confiance entre les pays, une confiance qui repose sur l’observation rigoureuse des règles existantes, mais aussi sur la capacité des gouvernements à atteindre des compromis satisfaisants, lorsque les circonstances demandent de la souplesse, et à les justifier de façon appropriée auprès des citoyens.

Cette transition n’en reste pas moins nécessaire.

La récente initiative lancée par la Commission européenne en ce qui concerne le rôle international de l’euro témoigne de la nécessité d’opérer une transition du cadre actuel, de lois multiples et de règles particulières, vers un système fondé sur l’harmonisation et des institutions. L’intensification des tensions commerciales et le recours accru aux sanctions comme instruments de politique étrangère montrent que les lois américaines sont de plus en plus appliquées par-delà les frontières des États-Unis, sous la forme d’amendes infligées à des sociétés établies hors du territoire américain ou d’interdictions d’accéder au système de paiement américain, s’appuyant sur le rôle central que jouent le système financier et le dollar américains dans le commerce mondial.

Plusieurs gouvernements européens estiment que renforcer le rôle international de l’euro permettrait d’atténuer ces effets. Or, si les marchés doivent envisager l’éventualité d’un rôle renforcé de l’euro, il nous faut tenir compte des conditions sous-jacentes à la domination du dollar. Le fait que ce dernier soit l’expression d’un marché intégré des capitaux[34] en est une parmi tant d’autres. Pour que l’UE remplisse cette condition, qui fait partie des plus accessibles à ce stade de son développement, un programme d’harmonisation législative et institutionnelle serait nécessaire, dont la mise en place pourrait être rapide malgré sa complexité.

La deuxième raison pour laquelle une approche institutionnelle peut contribuer à produire de meilleurs résultats est que les institutions et leurs actions sont soumises à un contrôle démocratique mieux défini. C’est justement parce que les institutions sont investies d’un mandat et de pouvoirs précis qu’il est possible d’établir un lien plus direct entre les décisions qu’elles prennent et leurs responsabilités.

L’UE dispose déjà de nombreux canaux à travers lesquels ses citoyens peuvent exercer un contrôle démocratique, qu’il s’agisse des autorités nationales siégeant au Conseil de l’UE et des membres du Parlement européen, qui demandent des comptes aux institutions communautaires au nom de leurs électeurs. De fait, pour la première fois depuis la création de l’UE, une majorité d’Européens estiment aujourd’hui que leur voix est entendue au sein de cette dernière[35].

Il faut espérer que les dispositions mises en œuvre en matière d’obligation de rendre des comptes afin de contrôler les institutions de l’UE continueront d’être renforcées, étant donné que la perception de la légitimité de leurs actions en dépend. En ce sens, le rôle du Parlement européen est fondamental. Parmi toutes les institutions dotées d’un mandat d’exercice de contrôle démocratique, c’est la seule qui présente une perspective européenne.

La Cour européenne de justice constitue le second pilier du contrôle démocratique. Le rôle qui lui incombe, de veiller à ce que les institutions de l’UE respectent leur mandat, est d’autant plus essentiel en l’absence d’un gouvernement européen.

Le respect des jugements rendus par la Cour de justice est une condition nécessaire à l’État de droit. La cohérence et l’uniformité dans l’interprétation du droit de l’UE par l’ensemble des vingt-huit États membres constituent le fondement de ce dernier en tant qu’ordre juridique efficace et autonome[36]. L’une des fonctions essentielles du droit est de stabiliser les attentes en offrant un socle solide sur lequel citoyens et entreprises peuvent organiser leurs activités et préparer l’avenir[37]. Pareilles prévisibilité et sécurité sont particulièrement importantes pour l’Union économique et monétaire aujourd’hui.

Conclusion

Dans le monde actuel, les interactions technologiques, financières et commerciales sont si fortes qu’il n’y a guère que les plus grands pays qui soient en mesure, et encore pas totalement, d’être à la fois indépendants et souverains. La plupart des autres États-nations, dont les pays européens, ne réunissent pas ces deux caractéristiques.

L’Union européenne (UE) est le cadre institutionnel qui a permis aux États membres d’acquérir une souveraineté dans de nombreux domaines. Cette souveraineté est partagée, ce qui est préférable à l’absence de toute souveraineté. Elle est complémentaire de celle qui est exercée par les États-nations dans d’autres domaines et est appréciée des Européens.

L’UE représente une réussite politique qui s’est construite dans le cadre de l’ordre international qui a émergé après la Seconde Guerre mondiale. Elle est l’interprète fidèle des valeurs de liberté, de paix et de prospérité dans lesquelles cet ordre puise sa source.

L’UE constitue une réussite économique, car elle a fourni les conditions ayant permis à ses citoyens de générer, durablement, grâce à leur énergie, une vaste prospérité fondée sur le Marché unique et protégée par la monnaie unique. De façon spectaculaire, la dernière décennie a mis en lumière les insuffisances des politiques nationales et la nécessité de faire évoluer la coopération au sein de l’UE et au-delà.

La longue crise économique mondiale, les flux migratoires sans précédent et les inégalités exacerbées par les fortes concentrations de richesses dues au progrès technologique ont fait apparaître des fissures dans un ordre économique et politique qu’on supposait inaltérable.

Le changement est nécessaire, mais il existe divers moyens de le mettre en œuvre. D’une part ressurgissent certaines croyances qui ont largement façonné notre histoire. La prospérité des uns n’irait pas sans la pauvreté des autres, par exemple. D’autre part, la pertinence des organisations internationales et supranationales s’amenuiserait en tant que lieux de négociations où des compromis peuvent être trouvés. Enfin, l’affirmation de soi, de l’identité, devient la première exigence de toute politique. Dans un tel monde, la liberté et la paix deviennent des accessoires dont on pourrait se passer à tout moment.

Or, si nous voulons que ces valeurs essentielles demeurent, la voie à suivre est tout autre : il nous faut adapter les institutions existantes au changement. Jusqu’à présent, ce processus d’ajustement s’est heurté à des résistances, car les inévitables difficultés politiques nationales semblaient toujours primer sur cette nécessité. Ces réticences ont instauré le doute quant à la capacité des institutions à réagir aux événements et ont renforcé la voix de ceux qui souhaitent les affaiblir.

Pourtant, aucune équivoque n’est permise : cet ajustement devra être aussi profond que le nécessite la fragilité de l’ordre existant et aussi ample qu’est le nouvel ordre géopolitique, qui évolue à rebours des intérêts de l’Europe.

L’UE a voulu créer une souveraineté là où il n’y en avait pas. Il n’est pas surprenant que, dans un monde où les points de contact entre les grandes puissances se transforment toujours plus en points de frictions, les défis externes menaçant l’existence de l’UE se fassent de plus en plus pesants. Dès lors, une seule réponse est possible : restaurer l’unité de vision et d’action sans laquelle la cohésion de pays aussi différents ne pourra pas être maintenue.

Ce souhait est doublé d’une aspiration guidée par un intérêt politique et économique. Par ailleurs, des défis internes, non moins déterminants pour l’avenir de l’UE, doivent également être surmontés. Nous devons apporter une réponse à la perception d’un manque d’équité entre les pays et entre les classes sociales. Nous devons d’abord être à l’écoute, puis passer à l’action et expliquer.

L’unité et l’équité sont plus nécessaires que jamais à l’orientation des politiques en Europe.

Je souhaiterais, pour conclure, citer les propos du pape émérite Benoît XVI, qu’il avait tenus lors d’une allocution célèbre voici trente-huit ans :

Rester modéré et faire de son mieux sans demander l’impossible, le cœur brûlant, a toujours été difficile ; la voix de la raison n’est jamais aussi forte que les appels irrationnels... Mais la vérité est que la morale politique consiste précisément à résister à la séduction des grandes paroles... La morale n’est pas dans le moralisme de l’aventure... Ce n’est pas l’absence de tout compromis mais le compromis lui-même qui constitue la véritable morale de l’activité politique[38].

  1. [1]Note de réflexion de Monnet, J., Les Portes, Archives de la Fondation Jean Monnet pour l’Europe, août 1965.
  2. [2]Commission européenne (2018), L’opinion publique dans l’Union européenne, Eurobaromètre Standard 90 – automne 2018, Direction générale de la Communication, Commission européenne, Bruxelles.
  3. [3]John Locke, An Essay concerning the true original, extent and end of civil Government (traité sur le gouvernement civil : de sa véritable origine, de son étendue et de sa fin), 1690.
  4. [4]CNUCED (2018), Rapport sur l’investissement dans le monde 2018 : l’investissement et les nouvelles politiques industrielles.
  5. [5]Un débat existe sur la question de savoir si la technologie peut évoluer à l’avenir dans des directions rendant les chaînes de valeur mondiales moins importantes. Les technologies comme l’impression 3D ou la robotique pourraient permettre la production locale de beaucoup plus de biens. Certains chercheurs estiment que les mutations technologiques n’ont à ce stade que peu ralenti la délocalisation, alors que d’autres prédisent un retour en arrière plus net. Cf. De Backer, K., Menon, C. Desnoyers-James, I. et Moussiegt, L. (2016), Reshoring: Myth or Reality?, OCDE de la Science, Technology and Industry Policy Papers, n° 27, Éditions de l’OCDE ; et Baldwin, R. (2016), The Great Convergence: Information Technology and the New Globalization, Harvard University Press.
  6. [6]OCDE (2018), Perspectives économiques de l’OCDE, volume 2018, n° 1, chapitre 2.
  7. [7]Cf. in ‘t Veld, J. (2019), Quantifying the Economic Effects of the Single Market in a Structural Macromodel, European Economy Discussion Paper, n° 094, Commission européenne, février.
  8. [8]Ce scénario repose sur une hypothèse contrefactuelle selon laquelle le commerce est à nouveau soumis aux règles de l’OMC et les taux de la nation la plus favorisée (NPF) sont appliqués en guise de droits sur les biens. Pour les barrières non tarifaires, il s’appuie sur des estimations des échanges commerciaux entre l’UE et les États-Unis. Cf. in ‘t Veld, J. (2019), op. cit.
  9. [9]Mesuré par le PIB ajusté à la parité de pouvoir d’achat.
  10. [10]Hors échanges intra-UE.
  11. [11]Pour de plus amples détails, cf. BCE (2015), The international role of the euro, Francfort-sur-le-Main, juillet.
  12. [12]Cf. Gopinath, G., Itskhoki, O. et Rigobon, R. (2010), Currency Choice and Exchange Rate Pass-Through, American Economic Review, vol. 100, n° 1, pp. 304-336.
  13. [13]Cf. Falagiarda, M., McQuade, P. et Tirpák, M. (2015), Spillovers from the ECB’s nonstandard monetary policies on non-euro area EU countries: evidence from an event-study analysis, document de travail de la BCE n° 1869 ; Potjagailo, G. (2017), Spillover effects from Euro area monetary policy across Europe: A factor-augmented VAR approach, Journal of International Money and Finance, 72 (avril) : 127-147 ; Bäurle, G., Gubler, M. et Känzig, D. (2017), International inflation spillovers – the role of different shocks, document de travail de la Banque nationale suisse, n° 7/2017.
  14. [14]Cf. Draghi, M. (2018), Europe and the euro 20 years on, intervention du président de la BCE lors de la réception du titre de docteur honoris causa en sciences économiques de l’École supérieure Sainte-Anne, à Pise, le 15 décembre 2018.
  15. [15]Cf. Blind, K., Mangelsdorf, A., Niebel, C. et Ramel, F. (2018), Standards in the global value chains of the European Single Market, Review of International Political Economy, 25:1, 28-48 ; Nadvi, K. (2008), Global standards, global governance and the organization of global value chains, Journal of Economic Geography, 8(3) : pp. 323-343.
  16. [16]Cf. Devereux, M., et al. (2008), Do countries compete over corporate tax rates?, Journal of Public Economics, vol. 92 (5-6), pp. 1210-1235.
  17. [17]OCDE (2018), Perspectives économiques de l’OCDE, volume 2018, n° 1, Éditions de l’OCDE, Paris.
  18. [18]Cf. Commission européenne, Les nouvelles règles de l’UE visant à éliminer les principales lacunes exploitées dans le cadre de l’évasion fiscale des entreprises entrent en vigueur le 1er janvier, communiqué de presse, Bruxelles, 30 décembre 2018.
  19. [19]Affaires jointes T-131/16, Belgique/Commission et T-263/16, Magnetrol International/Commission, arrêt du Tribunal du 14 février 2019.
  20. [20]Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, abrogeant la directive 95/46/CE (règlement européen général sur la protection des données).
  21. [21]Règlement d’exécution (UE) 2016/2286 de la Commission du 15 décembre 2016 fixant des règles détaillées relatives à l’application de la politique d’utilisation raisonnable, à la méthode pour évaluer la viabilité de la suppression des frais d’itinérance supplémentaires au détail et aux informations que le fournisseur de services d’itinérance doit transmettre aux fins de cette évaluation.
  22. [22]Paiements transfrontière – Règlement (CE) 924/2009. La modification du règlement en vue de renforcer ses dispositions est presque achevée, cf. le Communiqué de presse du Parlement européen.
  23. [23]Allemagne, Belgique, Danemark, Espagne, Finlande, Grèce, Irlande, Italie, Royaume-Uni et Suède.
  24. [24]OCDE (2010), Les lois en faveur de l’égalité de traitement ont-elles entraîné une amélioration de la qualité de l’emploi des travailleurs à temps partiel ?, encadré 4.3., Perspectives économiques de l’OCDE : Sortir de la crise de l’emploi.
  25. [25]Report of the Massachusetts Commission on Old Age Pensions, Annuities, and Insurance, 1910.
  26. [26]Cf. DeWitt, L. (2010), The development of social security in the United States, Social Security Bulletin, 70(3).
  27. [27]https://ec.europa.eu/commission/priorities/balanced-and-progressive-trade-policy-harness-globalisation_fr
  28. [28]Pour participer, par exemple, au système européen de préférences généralisées, les pays en voie de développement doivent mettre en œuvre les conventions fondamentales des Nations unies sur les droits humains ainsi que les conventions de l’Organisation internationale du travail.
  29. [29]Cf. Bradford, A. (2012), The Brussels Effect, Northwestern University Law Review, vol. 102, n° 1.
  30. [30]Cf. Commission européenne/EACEA/Eurydice (2018), L’espace européen de l’enseignement supérieur en 2018 : rapport sur la mise en œuvre du processus de Bologne, Luxembourg : Office des publications de l’Union européenne.
  31. [31]Pour une discussion de ces phénomènes dans le contexte des États-Unis, cf. Inman, R. et Rubinfeld, D. (1997), Rethinking Federalism, Journal of Economic Perspectives, vol. 11, n° 4, automne 1997.
  32. [32]Cf. http://ec.europa.eu/trade/policy/countries-and-regions/negotiations-and-agreements/#_in-place et https://ustr.gov/trade-agreements/free-trade-agreements
  33. [33]Capella-Ramos, J. (2018), Recommandations par pays en matière de politiques économiques dans le cadre du Semestre européen 2018, Bulletin économique, n° 5, BCE.
  34. [34]Pour une discussion approfondie des politiques nécessaires pour accroître le rôle international de l’euro, voir Cœuré, B., The euro’s global role in a changing world: a monetary policy perspective, discours prononcé au Council on Foreign Relations, New York, le 15 février 2019.
  35. [35]Commission européenne (2018), op. cit.
  36. [36]Affaire 6/64, Costa contre E.N.E.L., arrêt de la Cour de justice du 15 juillet 1964, p. 594 ; affaire 314/85, Foto-Frost contre Hauptzollamt Lübeck-Ost, arrêt de la Cour de justice du 22 octobre 1987, paragraphes 15 et 16.
  37. [37]Habermas, J. (2008 repr.), Between Facts and Norms: Contributions to a Discourse Theory of Law and Democracy, traduction de William Rehg, MIT Press, p. 144 et seq ; Luhmann, N. (1993), Das Recht der Gesellschaft, Suhrkamp, pp. 150-153.
  38. [38]Sermon prononcé à l’église Sankt Winfried de Bonn, le 26 novembre 1981.
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